Après une nuit qui n’a pas été de tout repos pour les Figaristes qui ont passé la marque de la Jument des Héaux de Bréhat aux alentours de 01h15 du matin pour les premiers, l’heure des choix a sonné ce matin pour les concurrents qui traversent la Manche pour la 3e fois : emprunter la route la plus courte vers le Fastnet ou tirer la barre et essayer de rejoindre la Cornouaille anglaise le plus rapidement possible pour profiter au mieux d’une bascule de vent à droite. Au pointage de 16h45, Corentin Horeau (Banque Populaire) était en tête, talonné par Guillaume Pirouelle (Région Normandie) à 0,3 mille et Loïs Berrehar (Skipper MACIF 2022) à 0,5 mille. Il restait 240,1 milles à parcourir au leader avant d'arriver à Kinsale (Irlande).
Vent mollissant et bascule de courant : tous les ingrédients étaient réunis la nuit dernière pour que le passage de la Jument des Héaux de Bréhat, dernière marque de parcours avant le Fastnet, soit le théâtre d’une belle foire d’empoigne qui a donné lieu à un regroupement général de la flotte. Premier à le passer, Basile Bourgnon (EDENRED) a en effet pris temporairement les commandes de la flotte dans la nuit aux dépens de Guillaume Pirouelle, qui a vu son avance fondre après avoir perdu sept minutes à se dégager d’un casier au large de Guernesey. « Cette nuit, on est arrivés sous spi aux Héaux de Bréhat. Quand je suis passé avec les premiers bateaux, il n’y avait pas encore de courant donc ça allait. Mais on a vu des bateaux et des trajectoires dans tous les sens. Pour l’instant, on est plutôt en avance sur les routages, c’est plutôt pas mal. Après Land’s End, il faudra choisir son camp pour monter en Irlande. Ça va être assez technique », déclarait ce matin Corentin Horeau (Banque Populaire), 3e à se présenter au waypoint.
En début d’après-midi, les 32 concurrents en lice sur la 54e édition de La Solitaire du Figaro Paprec évoluaient dans une quinzaine de nœuds de vent d’ouest en direction de Land’s End, la pointe de la Cornouaille anglaise, qu’ils devraient doubler aux alentours de 20h00 ce soir. « Le vent est en train de tourner progressivement à droite. On attend avec impatience les premiers virements, qui devraient arriver dans deux-trois heures pour voir comment ça croise », expliquait à 14h00 Yann Chateau, Directeur de Course embarqué à bord du catamaran We Explore de Roland Jourdain. « Les partisans de l’option gauche devraient bénéficier d’un meilleur positionnement niveau courant et faire une route plus courte. L’option droite permet de jouer la bascule de vent mais est un peu moins bien niveau courant », analyse-t-il.
Cet après-midi, les concurrents n’auront pas de grandes décisions tactiques à prendre, ces derniers ayant déjà été fait dans la matinée. Ils auront néanmoins un nouveau choix à effectuer dans la nuit, « entre le nord et le sud des îles Scilly, ce qui impliquera donc un choix : passer au nord ou au sud du DST (dispositif de séparation du trafic, ndlr) situé à l’ouest des Scilly », comme le précise Yann Chateau. S’il ne devrait pas y avoir d’évolution majeure en terme de météo cet après-midi ni ce soir, le vent va commencer à mollir dans la nuit, « avec une petite dorsale demain matin vers 10h00, qui fera passer d’un vent de nord à un vent de sud. Il y aura un dernier point de virement un peu important à placer ».
D’ici ce soir, les concurrents devront essayer de se placer sur le plan d’eau pour essayer de tirer au mieux leur épingle du jeu, surtout que « la flotte est assez tassée et qu’il peut y avoir encore pas mal de changements dans la hiérarchie jusqu’à la dorsale de demain matin ». Quel choix s’avérera le plus payant ? Verdict ce soir !
Ils ont dit :
Basile Bourgnon (EDENRED), 4e au pointage de 16h45, à 0,5 mille du leader : « Les options commencent, les écarts se font, c’est intéressant. Je suis sur un positionnement qui va trancher dans 30 ou 40 milles. C’est sympa d’oser et de voir quand même les collègues à côté, de comprendre un peu ce qu’ils font, les voiles qu’ils utilisent. Je vais essayer de maintenir la distance avec eux, en revenant devant comme j’étais ce matin. Je suis sur une route rapide pour faire un peu moins de distance que les autres. C’est de l’anticipation avec le courant qui va arriver et va se renverser dans l’après-midi. C’est un placement plutôt par rapport au courant que par rapport au vent, on verra bien. Les bords sont assez droits. Pour une fois, j’arrive à faire des siestes d’environ vingt minutes, et ça fait une grande différence avec celles de dix ! Je suis en forme. Je mange bien à bord, j’écoute un peu de podcast, de musique et j’ai remis le ciré parce qu’il pleut ! »
Charlotte Yven (Skipper MACIF 2023), 20e à 4,4 milles du leader : « Après deux jours de course, la fatigue commence à se faire doucement sentir, mais il y a plein de choses à faire donc on ne s’ennuie pas. Je n’ai pas fait un super début de course, mais j’ai réussi à retrouver le paquet dans la journée d’hier. Et maintenant, il reste un bon morceau avec pleins de coups à jouer. Là, on est sous gennak’ (gennaker) bâbord amure vers l’Angleterre. On a 12-14 nœuds de vent, ça avance bien. On attend une petite bascule de vent en fin de journée pour virer de bord et faire route vers l’Irlande. L’enjeu consiste à bien comprendre ce qu’il va se passer d’ici la fin de l’étape. Le bulletin quotidien transmis par la Direction de Course nous permet d’actualiser la météo qu’on a eue avant le départ, de voir comment ça évolue et ce qu’on peut faire avec. Là, j’ai réussi à me reposer sur les longs bords qu’on a eus, je suis en forme ! »
Maël Garnier (J’❤️Garnier), 17e à 4 milles du leader : « Je me suis fait un peu avoir dans la nuit et ce matin au passage du front. Je me suis décalé un peu plus au nord pour remonter avec le courant, mais au final, je n’avançais pas du tout. Cela n’a pas marché, mais je peux encore me refaire, il reste plein de choses à faire. J’ai des hauts et des bas depuis le début. Le départ c’était bien, puis j’ai eu un bord de portant un peu pourri avec mon amure de spi que j’avais mal réglée. Ensuite, j’ai réussi à remonter dans les dix. Là, je vais essayer de gratter quelques places pour y rester, mais cela va aussi dépendre de ce que font les voisins. Ce midi, on progresse bien gîtés. On fait ce qu’on peut pour bien faire marcher les foils et le bateau. Je suis aux réglages, tout en essayant de me reposer de temps en temps. Mais avec Charlotte (Yven) à moins de 100 mètres, ce n’est pas évident ! »