On le pressentait, les coureurs la redoutaient, ou la souhaitaient... et elle est fidèle au rendez-vous du suspens, de l’inattendu, de l’imprévisible. La troisième étape de cette Solitaire 2020 dépasse en intensité émotionnelle tout ce que les spécialistes et habitués de l’épreuve avaient imaginé. Le navigateur - formateur météo Dominic Vittet conseille grand nombre de solitaires sur cette édition 2020, Sam Goodchild (Leyton), Gildas Mahé (Breizh Cola), Fabien Delahaye (Laboratoires Gilbert), Benoit Mariette (Génération Sénioriales), Benoit Hochart (Ma Chance Moi Aussi), les lorientais, mais aussi Alexis Loison (Région Normandie) et Pierre Quiroga (Skipper MACIF 2019)… Il nous livre avec enthousiasme les sentiments que lui inspire cette étape hors norme par bien des aspects.

« Quelle course extraordinaire ! Elle n’a en définitive causé aucune surprise jusqu’à Portsall. La descente depuis Dunkerque jusqu’à Dieppe n’offrait pas d’option, et les coureurs se sont montrés appliqués, en navigant bien. Passée la bouée Daffodils devant Dieppe, l’extension d’une dorsale au beau milieu de la Manche interdisait à mon sens d’aller jouer au large. Yann Eliès (Quéguiner Matériaux - Leucémie Espoir) s’y est risqué, et il aurait pu y laisser des plumes. Ceux qui, à l’instar de Sam Goodchild, Xavier Macaire (Groupe SNEF), Loïs Berrehar (Bretagne CMB Performance) ou Pierre Quiroga, éphémères leaders, ont parfaitement négocié le contournement du Cotentin, les Anglo-Normandes, avant de tomber à leur tour dans un trou d’air. C’est là qu’on voit les grands marins qui ont su passer La Hague avec la fin du courant, et qui auraient pu déjà creuser un écart. Ils arrivent en Baie de Morlaix dans un trou de vent, et la flotte revient par derrière ! Injuste ! Mais ce même groupe a bien tricoté à la terre pour aborder le Fromveur avec le courant. La porte aurait pu, aurait dû se refermer au nez de leurs poursuivants. Mais ça passe pour le peloton. Pire, Les Armel Le Cléac’h (Banque Populaire), Eric Péron (French Touch), pourtant en position de battus, plus de 8 milles derrière les leaders, voyant les écarts et la renverse du courant, plongent vers le Four, et déboulent en tête quelques heures plus tard ! Quel rebondissement. Mais ce n’est pas fini et une micro régate totalement déventée se met en place au matin du 4e jour de course. Les Cadors, les Seigneurs sont au rendez vous. J’y vois la démonstration de force d’un Yann Eliès, en tête toute la nuit, mais qui voit à l’approche de Belle-Ile tous ses efforts ruinés. De petits échanges thermiques apparaissent à la côte. Ses poursuivants s’y précipitent, et Armel le Cléac’h revient dans la match ! Epique !

Dernier coup de théâtre, et non des moindres, c’est par l’ouest de Belle-Ile que se réalise le hold up de la semaine, initié par un récidiviste de l’exercice, Adrien Hardy (Ocean Attitude), et conclue par l’étonnant Fred Duthil (Technique Voile / Cabinet Bourhis Generali). Sublime ! »