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Publie le 25/06/2019
A quelques milles seulement de la bouée de Saint-Marcouf, l’ensemble de la flotte s’est brutalement arrêté, suite à une panne de vent généralisée : l’avance prise par Eric Péron au passage de la marque normande semble désormais dérisoire et on voit mal qui pourrait profiter de ce stand-by pour s’échapper quand il n’y a autour de soi qu’un néant immense. Il n’y a plus qu’à patienter…
Il ne reste plus que quatre solitaires qui n’ont pas contourné la bouée de Saint-Marcouf : Cécile Laguette (Eclisse) et Robin Marais (Ma chance moi aussi) en approche de Barfleur, et Benoît Hochart (Gagner le large) et Matthieu Damerval (Klaxoon-M) encore au milieu de la Manche. Or pour tout le monde, particulièrement ceux qui tentent de traverser la baie de Seine, la mer a des reflets d’argent : les solitaires peuvent se mirer dans ces eaux claires que quelques détritus (morceaux de plastique, cordages en polypropylène, emballages, bouteilles vides…) parsèment. Et le ballotement marin déploie de maigres rides autour des voûtes qui frappent régulièrement la surface.
Au vent suspend ton vol
La brise s’en est allée et toutes sortes d’insectes plus ou moins volants se sont réfugiés sur la moindre pièce flottante, non point pour une quelconque activité, mais simplement pour s’y reposer. Emportées par une bouffée de chaleur soudaine, ces bêtes ailées s’immiscent par les plus petits interstices au cœur des navires pour importuner les marins. Etranges formes préhistoriques zébrées ou poilues, corps pincés ou gonflés, têtes hystériques ou placides, ailes repliées ou déployées, silencieuses ou siffleuses, ces millions d’animaux fouinant dans les moindres recoins font pendant aux milliers de méduses et d’algues qui engorgent les flots.
De rage ou de désespoir, chaque solitaire en profite pour checker ses appendices : les plongeons se succèdent autant pour vérifier que le surfaçage est parfait que pour se soulager du poids étouffant d’une atmosphère surchauffée ou d’un crâne torturé par les doutes. « Tout ça pour ça ! » entend-t-on susurré par-delà les ondes. Car qu’ils soient partis en goguette à l’occasion de leur dernière traversée de la Manche ou qu’ils aient acquis leurs premières échappées, les voilà tristement voiles pendantes, attendant des cieux un signe qui ne vient point. Le vent s’est envolé !
Au temps emporte le vent
Mais le chronomètre poursuit inlassablement ses tours de passe-passe : que lui importe que l’air vibrionne, que la mer se pare de nappes camaïeu, que le ciel se couvre d’un pudique voile ! Le temps s’écoule, que le vent s’ébroue ou s’effondre. Or le paramètre temporel est le fondement de La Solitaire URGO Le Figaro : Yoann Richomme (HelloWork-Groupe Télégramme) cumule plus d’une heure (1h11’14’’ exactement) sur un concurrent, Gildas Mahé (Breizh Cola-Equi’Thé) qui n’est qu’à un jet de pierre en baie de Seine… Quant à Eric Péron (French Touch), celui-là même qui possédait près d’une demi-heure sur Pierre Leboucher (Guyot Environnement), il lui rend désormais une poignée d’encablures…
Or les prévisionnistes de tous bords annoncent une grande langue de brise de Nord-Est coulant de Dunkerque à Cherbourg dès la journée de mercredi. Une puissante poussée pouvant dépasser les trente nœuds, voire friser les quarante. Un vent de Nordet mal venu pour en finir avec cette quatrième étape de La Solitaire URGO Le Figaro errant entre Carentan et Dieppe, face à ce futur flux perturbateur. Qu’il vienne balayer cette baie de Seine et ces millions de mouches et d’insectes volants qui se sont emparés des navires ! L’œil homérique de ce minimum barométrique observe indifférent cette agitation futile : avancer d’un mètre à l’heure a-t-il encore un sens quand le port final pointe à plus de 80 milles ?